Rencontre avec Garry Cutt, président du jury

En prélude aux championnats de France qui se déroulent à Lille les 16 et 17 janvier 2016 dans la salle du nouveau Siècle, nous avons choisi de prendre le temps d'une réflexion. Tous les Brass Band participants sont au sommet de leur préparation, les concerts s'enchaînent et la pression monte.

Cette année c'est une chance que nous avons de recevoir un expert en matière de Brass Band, de sa culture, de sa musique, de son style. Garry Cutt, président du jury de cette année, est une référence dans ce microcosme. Garry Cutt a accepté de répondre à nos questions avec plaisir, nous avons donc choisi ses mots pour revenir sur la pièce imposée en catégorie Honneur, ses pièges, son style et il livre quelques clefs pour une bonne interprétation en concours.

"Ce n'est pas un défi technique, mais musical"

En tant que président du jury, Garry Cutt a choisi la pièce imposée en catégorie Honneur, il s'agit de "Of Distant Memories (music in an olden style)" de Edward Gregson : "Le choix de la pièce est basé sur des raisons personnelles, j'admire Gregson en tant que compositeur, pour moi c'est une de ses plus belles pièce" et celui-ci de défendre son choix : " Selon moi, quiconque pense que cette pièce est facile  commet une erreur. C'est un vrai test. Ce n'est pas un défi technique, mais musical".

Garry Cutt développe alors sa vision de la pièce telle qu'elle doit être jouée, dans le plus pur respect de la tradition... et de la partition : " Les chefs devront donner un sens véritable au tempo indiqué, qui est je pense, très bien pensé par le compositeur. Allez trop vite et vous perdrez l'équilibre de la musique.

Les autres points que les ensembles et les chefs devront prendre en considération sont le STYLE. Certains passages de cette pièce appartiennent à la génération de compositeur précédent, Ball, Fletcher etc, et par conséquent ce ne sera pas assez de "juste jouer les notes".

Garry Cutt n'oublie pas de mentionner le travail des solistes, mis en avant avec force par Gregson : "Cette pièce est très exigeante pour la majorité des solistes et elle requiert un accompagnement rigoureux et agréable. Les solistes devront être lyriques".

Enfin : "Cette pièce doit sonner comme un tout, du début à la fin. Donc toutes les transitions dans chaque mouvement doivent être homogènes et logiques. La dynamique doit être un point particulièrement important pour pouvoir passer d'un Forte à un Fortissimo. Ce n'est pas de la musique forte pour faire un effet. De plus, il n'y a pas de place dans une telle pièce et dans ce style d'écriture pour cacher des défauts inhérent à l'ensemble. Certaines pièces modernes peuvent le permettre. Ce n'est pas le cas ici.

Encore une fois, le choix de cette pièce doit permettre de penser à faire du Brass Band autrement, avec un son de brass band traditionnel, un usage précis et contrôlé du vibrato etc".

La bonne direction

Le chef anglais nous apporte alors sa vision du Brass Band aujourd'hui : "Selon moi, les brass band d'aujourd'hui ont perdu de vue comment jouer une mélodie traditionnelle, je pense donc que cette pièce peut les ramener sur la bonne direction".

Nous avons alors demandé quelles connaissances Garry Cutt avait de notre culture Brass Band en France : "J'ai déjà entendu les meilleurs ensembles français à plusieurs reprises. La progression est vraiment remarquable. Le son, le timbre est peut-être parfois un peu "clair". Les capacités techniques sont admirables cependant". Celui-ci avoue cependant :"Cela fait quelques années que je n'ai pas entendu jouer des Brass Band de divisions inférieures".

Garry Cutt est à la direction du Fairey Brass Band depuis 2013, ce Brass Band en compétition depuis le début du 20ème siècle est en pleine ascension avec une 3ème place au Royal Albert Hall cette année (9 victoires au total) et deux titres de champion dans leur région (nord-est) en 2014 et 2015 (16 victoires au total). C'est donc un expert en la matière qui jugera les Brass Band français à Lille. Voici, son idée d'une bonne performance en concours :"Une bonne performance, pour moi, est celle qui vous emmène en voyage, qui raconte une histoire sans heurts. La musique doit découler d'elle-même et les dynamiques doivent être intelligemment placées. Tous les forte ne doivent pas être identiques. Les solistes doivent être confiants et lyriques avec un accompagnement minutieux. Au passage, les notes ratées ne me gènent pas tant que je sens que le soliste a la bonne intention, le bon sentiment, la bonne musicalité en somme. Ce sont les bases, selon moi, d'une bonne performance de concours".

Pour finir Garry Cutt se dit très honoré d'être invité par la Confédération Musicale de France : "Je dois avouer que je suis enchanté que l'on me propose de présider le jury des championnats de France et je suis vraiment impatient d'être à Lille le week-end prochain". Quant à ces collègues dans le jury qu'il préside, il déclare : "Je ne connais pas Gildas Harnois, mais je connais Bertrand Moren, plutôt professionnellement".

Enfin, alors que nous lui faisons remarquer qu'en France on ne donne pas de prix de meilleur soliste à l'issu du concours, le chef anglais répond avec diplomatie : "Je pense qu'il serait bien de reconnaitre et de donner un prix de meilleur soliste, mais ce n'est pas impératif".

 

propos recueillit et traduit par BrassBandInfos